Ca va foutre une belle pagaie

Ca va foutre une belle pagaie

– Hop, attends attends, on peut pas y aller !

– Quoi ?

– Y’a un problème.

– Y’a un problème, ou tu as un problème ?

– Je…y’a un problème, que je…j’ai repéré.

– Autrement dit, tu as un problème. C’est quoi cette fois ? Tu as oublié le ravitaillement ?

– Ha ha, aucune chance.

– Je te crois. Tu ne t’es pas échauffé ?

– N…enfin si c’est bon, c’est pas ça.

– Alors quoi ? C’est quoi cette fois ? Je ne te crois pas nécessaire de te rappeler à quelle heure on s’est levés, vu comme tu t’es plaint je pense que tu l’as retenue. Ca fait trois jours qu’on en parle, j’ai t’ai exposé par le détail le trajet, le principe, et l’absence de risque, on a vérifié ton gilet de sauvetage, l’eau est à une température clémente, suffisamment profonde mais pas trop, y’a pas de rapides, il faut beau, alors est-ce que tu peux m’expliquer ce que tu as encore trouvé pour ne pas poser tes fesses au fond de ce foutu bateau et commencer à pagayer, A LA FIN ?!

– Ben justement, c’est ma pagaie. Elle est tordue, elle peut pas marcher.

– Tordue ? Je dirais bien que vous êtes faits pour vous entendre, mais qu’est-ce que tu veux dire exactement ?

– Ben regarde, elle est pas droite. Les deux côté sont pas alignés.

– Elle…non mais c’est normal, c’est fait exprès. Tu fais un mouvement de poignet quand tu donnes un coup de rame, c’est voulu. On peut y aller.

Allez, à l’eau maintenant, ça suffit.

– Je suis quand même pas totalement rassuré. T’es sûr que c’est pas dangereux ?

Mais non.

– Je suis sûr. Tu as peur de l’eau ou quoi ?

– Non, mais c’est ce genre d’embarcation. Ca me rassure pas.

– Le kayak ? Je te rappelle que les Inuits chassent le narval avec ça.

– Je trouve que ça relève plus de l’inconscience qu’autre chose, perso. Je sais pas, ça me paraît pas bien solide et sûr.

– Pas bien solide ? Tu mets en doute la robustesse du fier navire qui a précipité la chute du 3e Reich ?

– Qui quoi ? Excuse-moi, comme tu es à l’arrière du bateau j’entends pas toujours bien. J’ai cru que tu disais un truc complètement aberrant, genre les kayaks avaient précipité la chute du 3e Reich. N’importe quoi.

– C’est exactement ce que j’ai dit.

– Tu essaies de me faire marcher, sur l’eau ?

– Pfff, tu manques bien trop de foi pour ça, pauvre pêcheur. Je suis absolument sérieux.

– Des kayaks contre les Nazis, sérieusement ?!

– Absolument, et ce n’est pas la peine de te retourner tu vas nous faire verser.

– Je suis curieux de connaître les détails de la participation des forces spéciales inuites à la Seconde Guerre Mondiale.

– Pas inuites, britanniques. Mais c’est la faute des Italiens, à l’origine.

– Mais enfin, quels Italiens ?

– Tu devrais t’en souvenir, je t’en ai déjà parlé. La Decima, ça te dit quelque chose ?

– Ah oui. L’unité de plongeurs de combat, celle qui avait transformé une épave de la baie de Gibraltar en base secrète sous le nez de la Royal Navy.

– Exactement.

– Mais quel est le rapport, ils n’avaient pas de bateaux à rames ?

– Non. Mais le 19 décembre 1941, la Decima mène une opération dans le port d’Alexandrie, et je t’interdis de chanter…

– On me brime !

– Le commando coule deux navires britanniques, les HMS Valiant et Queen Elizabeth. Churchill ne le prend pas bien, ce qui est assez logique, et souhaite disposer de capacités similaires, c’est-à-dire pouvoir mener des attaques rapides dans des ports ennemis avec seulement quelques hommes, dans les meilleurs délais. Or il se trouve que quelques mois plus tôt, l’Amirauté avait précisément reçu une proposition pour constituer une unité d’attaque composée de petites embarcations légères. Et l’avait rejetée. Son instigateur l’a alors soumise à nouveau au QC des Opération Combinées, pour le même résultat. Mais après l’attaque d’Alexandrie le chef de ce même QG, Lord Mountbatten, change d’avis. Il ordonne la mise en place d’une unité, la Royal Marine Boom Patrol Detachment, qui est constituée le 6 juillet 42.

– Boom Patrol ? C’est une faute de frappe, il voulait dire Doom Patrol ?

– Non. Malheureusement. En fait, l’inspiration de cette unité ce sont les vedettes explosives de la Decima, qui sont désignées par le terme générique de « boom patrol boats », littéralement les patrouilleurs qui font boum. D’où le nom de l’unité quand il est envisagé qu’elle emploie elle aussi ce genre de moyens. Ce qui au final ne se fera pas. Toujours est-il que cette fois on signale au capitaine de la Marine royale Herbert Hasler que son idée est validée.

– C’est qui ça Herbet Hasler ?

– Hasler est né à Dublin en 1914 A l’époque Dublin c’est le Royaume-Uni. Son père meurt quand le bâtiment sur lequel il servait, le Transylvania, est torpillé en 1917. Ce qui ne l’empêche pas de développer une passion pour tout ce qui relève du nautisme et de la flotte. Gamin, il construit son propre canoë à partir des instructions d’un magazine pour enfants, et il le prend pour des excursions en mer autour de Portsmouth.

Ah ça, hein, c’est pas en passant ses nuits sur Fortnite…

A côté de ça c’est un bon élève, qui décroche une bourse pour une des meilleures écoles privées du pays. Bon dans les études comme pour les activités sportives, il intègre la Marine à sa sortie, exemple typique d’un jeune homme éduqué et athlétique.

Et avec la raie sur le côté.

En termes de service, Hasler participe à la campagne de Norvège en 1940, où il se distingue au point d’être décoré de l’Ordre de l’Empire britannique.

On exagère à peine.

– D’accord, le garçon semble remarquable.

– Et il s’y connaît en petites embarcations. Quand il reçoit le feu vert du commandement, il s’installe à Portsmouth et commence à recruter. L’unité est composée de 34 hommes, qui commencent à travailler sur des stratégies pour attaquer des ports de l’Axe avec des canots à moteur, et s’inspirant toujours d’attaques passées de la Decima, notamment en Crête le 26 mars 41. Puis la réflexion d’Hasler évolue et il décide de privilégier les plus petites embarcations, à savoir des kayaks. Petits, légers, maniables, et pliables plutôt que démontables, ils peuvent être facilement transportés pour franchir des passages terrestres. Et puis l’avantage d’un kayak comme ça c’est qu’il risque moins de perdre cargaison ou équipage s’il chavire.

– Comment ça ? Je t’assure que ça se retourne. J’en ai vus, j’ai fait les gorges de l’Ardèche en raft.

– Et les gorges chaudes aussi par la même occasion. Oui, ça se retourne, mais on peut éviter toute conséquence préjudiciable en portant une jupe, déjà.

– Hein ?!

– Citadin, va. En s’équipant d’une membrane qui scelle l’ouverture du kayak autour du pagayeur et en pratiquant la technique dite de l’esquimautage, un kayakiste entraîné peut se remettre à l’endroit s’il chavire sans qu’une goutte d’eau ne pénètre son embarcation. Tu n’auras qu’à essayer la prochaine fois que tu vas à la piscine.

– Admettons.

–  Hasler conçoit donc et fait fabriquer des kayaks spécialement prévus pour les opérations qu’il envisage, sous le nom de Cockle.

Ici un modèle prévu pour les attaques en forêt, comme l’indique son camouflage.

Hasler organise des sorties nocturnes sur les différentes rivières et dans les ports de la région pour entraîner ses hommes. Ils apprennent ainsi à pagayer silencieusement sur de grandes distances, à naviguer de nuit, à se glisser le long de bâtiments militaires, et à aller y poser des mines magnétiques avant de repartir sans un bruit. Quand tout le monde est prêt, on peut commencer les choses sérieuses.

– Non mais attends, ils veulent faire quoi avec une trentaine de gugusses dans des kayaks ?

– Je crois qu’il faut revenir un peu sur le contexte. En s’emparant du territoire français, les Nazis ont entre autres choses gagné un accès à la façade Atlantique. Ce qui constitue un atout non négligeable. Ils peuvent aller faire du surf dans des conditions bien plus agréables qu’en mer Baltique.

– Je suis sûr que ça a été leur principale motivation.

– C’est comme ça que j’aurais vu les choses, perso. Pour autant, il y a effectivement d’autres avantages. Pour des bâtiments civils comme militaires, rejoindre l’Atlantique par la Baltique ou la mer du Nord prend un peu plus de temps, et puis les accès sont relativement étroits, par conséquent c’est plus facile pour la Marine britannique d’essayer de gêner le passage. Ce qu’elle ne se prive pas de faire. Depuis la France, le transit est plus simple, plus rapide, et moins risqué. Les ports français vont ainsi jouer un rôle important pour la Kriegsmarine comme pour le ravitaillement de l’Allemagne, y compris depuis le Japon. C’est particulièrement vrai du port de Bordeaux. En contournant le blocus britannique, une flotte de 25 cargos et navires marchands y amène régulièrement du caoutchouc, de l’étain, du pétrole, des composants pour les munitions, ou du tungstène. Il acquiert ainsi une grande valeur stratégique.

– Ce qui en fait un objectif tout désigné pour les Britanniques.

– Oui, mais en raison de sa position, loin dans l’estuaire de la Gironde, c’est une cible difficile à aller chercher par des moyens classiques. Il est inconcevable d’envoyer une flotte d’attaque remonter l’estuaire, elle se ferait repérer et démonter avant d’avoir même pu voir sa cible. Par ailleurs une offensive de bombardiers suffisante pour causer des dégâts significatifs représenterait un risque trop élevé de victimes civiles, puisque le port se situe au milieu de la ville. Pas simple d’aller mener une attaque victorieuse contre Bordeaux.

– Sauf au foot.

– Certes, mais les Allemands refusent de jouer la guerre au ballon. Il faudrait donc trouver le moyen d’aller discrètement jusque dans le port, en évitant les patrouilles, les mines, les batteries installées sur les berges, et les navires militaires à quai, pour aller y couler des cargos et endommager les installations.

Je tente une dernière fois…non, vraiment ?

– Par exemple, des kayaks.

– Voilà. Hasler reçoit le feu vert pour lancer une attaque à la rame vers Bordeaux. C’est l’opération Frankton, approuvée le 21 septembre 1942. Et ce malgré l’échec d’un exercice organisé sur l’estuaire de la Tamise sur une distance comparable. Mais tant pis, faut y aller.

– A à la guerre comme à la guerre.

– C’est ça, et c’est en forgeant qu’on apprend à s’infiltrer de nuit sur des dizaines de kilomètres dans un estuaire lourdement défendu jusqu’à un port occupé afin de poser des mines magnétiques à retardement sur des cargos anti-blocus avant de repartir à pied.

– Ca se présente bien, quoi.

– On ne va pas se mentir, les chances d’en revenir sont considérées comme faibles. Voire très faibles. Ca n’en a pas le nom, mais ça s’apparente pas mal à une mission suicide. Cependant le commandement met en balance l’importance de la cible et l’effet potentiel de l’attaque, d’une part, et les pertes potentielles d’autre part. Risquer une douzaine d’hommes pour frapper les capacités du port de Bordeaux et couler plusieurs bâtiments ennemis ? Allez, ça se tente.

– Je dois admettre que le raisonnement se tient.

– Le plan prévoit 6 Cockles manœuvrés chacun par 2 hommes, débarqués d’un sous-marin le 6 décembre au niveau de l’embouchure de la Gironde. Soit à près de 150 bornes de l’objectif. Le commando couvrirait cette distance en 4 nuits, en se planquant sur les berges pendant la journée pour éviter de se faire repérer par les patrouilles. L’attaque doit donc intervenir le 10. Les hommes placeront leurs charges sur plusieurs bateaux, avant de prendre la fuite vers l’Espagne.

– Du gâteau.

– Les 6 kayaks portent tous des noms de code marins commençant par la lettre c : le Catfish (poisson-chat), à bord duquel Hasler embarque lui-même pour mener l’opération, le Crayfish (écrevisse), le Conger (congre), le Cuttlefish (sèche), le Coalfish (lieu noir), et le Cachalot.

– Je croyais qu’en anglais cachalot se disait spermwhale.

– Eh ben pas toujours. Cette appellation s’est imposée avec le temps en raison de son potentiel comique bien plus important, mais techniquement tu peux dire cachalot en anglais.

« C’est pas facile de les repérer en anglais. Ils se cachent a lot. »

– Donc ils sont partis pour attaquer Bordeaux avec un cachalot.

– Exactement. Et une écrevisse. Le 30 novembre, ils embarquent donc logiquement à bord du sous-marin baptisé Thon (HMS Tuna). Et en fait ce n’est qu’une fois à bord qu’on leur explique en quoi va consister la mission. Et qu’ils peuvent se faire une idée de leurs perspectives de réussite. Le Tuna prend un peu de retard le temps de manœuvrer à travers les mines qui protègent l’estuaire et les patrouilles, et finalement nos 12 commandos se mettent à l’eau le 7 décembre en fin d’après-midi. Avec d’emblée une grosse déception.

– Quoi donc ?

– Le Cachalot est blessé, je veux dire endommagé, au moment de son déploiement. Il ne peut pas participer.

– On perd tout de suite un avantage stratégique majeur.

Nooooon…

– Ca ne s’arrête pas là. Le Tuna met à l’eau les 5 kayaks restants à près de 20 km de l’embouchure du fleuve. Les équipages doivent donc négocier un trajet de cinq heures en pleine mer, de nuit, dans le froid, pendant la saison des grosses vagues. En dépit de l’entraînement des équipages, ces dernières sont fatales au Conger et au Cuttlefish. Le premier chavire, et en dépit de ses incontestables compétences en esquimautage, son équipage se retrouve à la flotte. Les deux hommes sont récupérés par leurs compagnons qui les emmènent jusqu’à la plage, mais ils y meurent d’hypothermie. Le second se perd, et quand son équipage finit par rejoindre la côté il est fait prisonnier.

– Ca va pas être évident de mener l’opération à terme à 50 %.

– D’autant moins qu’ils ne restent pas longtemps à 50 %. Le Coalfish est lui intercepté par une patrouille à l’aube du premier jour de la mission proprement dite. L’opération Frankton ne repose plus que sur un poisson-chat et une écrevisse. Qui ne se découragent pas et commencent leur progression vers Bordeaux. Ils se font bien repérer par quelques pêcheurs et locaux, mais ces derniers ont le bon réflexe de le garder pour eux.

– Braves gens.

– Le plan de marche est tenu sur les deux nuits suivantes, avant que le commando rencontre des conditions contraires, ce qui conduit Hasler à reporter l’attaque de 24 heures. Faut dire que quand tu remontes la Gironde à ce niveau, tu dois entre autres joyeusetés faire avec les marées. En plus de tout le reste. Mais bon, au moins personne ne coule ou ne se fait capturer.

– Ils arrivent jusqu’à Bordeaux ?

– Oui, ils atteignent le port le soir du 11 décembre. Chaque équipage dispose de 8 bombes, qu’ils placent sur un total de 6 navires, soit 4 cargos, 1 navire marchand intermédiaire, et 1 patrouilleur. Ils passent ainsi 3h30 à opérer au milieu du port, certes en pleine nuit mais alors que l’eau est calme et le ciel bien dégagé. Avant de mettre les voiles, façon de parler, sans se faire repérer. Il y a bien un patrouilleur qui entend quelque chose de suspect et balance un coup de projecteur, mais le poisson-chat n’est pas repéré, faut croire que le camouflage a marché.

Ca va, c’est bon, j’ai rien dit.

– Ca donne quoi comme résultat ?

– Les 6 cibles sont gravement endommagées, ce qui les laisse inopérantes au milieu du port pour plusieurs mois. L’opération est donc un succès, puisqu’elle porte un coup sérieux à la capacité de ravitaillement du Reich, le tout grâce à une attaque audacieuse au milieu d’un port pourtant lourdement gardé. En plus du succès militaire, c’est une humiliation pour les Allemands, et un motif de fierté pour les Britanniques.

– Et les deux équipages ?

– Ils se séparent et partent en direction de l’Espagne, avec l’espoir de pouvoir rentrer en contact avec la Résistance afin qu’elle leur facilite le trajet. Les deux hommes du Crayfish se font malheureusement capturer deux jours plus tard. En revanche Hasler et son coéquipier Bill Sparks réussissent à rejoindre leurs contacts au sein du maquis, et finissent par passer les Pyrénées après 3 semaines. Ils rejoignent alors la base britannique de Gibraltar, et sont de retour en Angleterre début avril. Malheureusement, ce sont les deux seuls survivants des 10 hommes qui ont pris la mer au soir du 7 décembre.

– Comment ça ?

– Je te rappelle que deux sont morts d’hypothermie pendant la première nuit. Les six autres ont tous été capturés les uns après les autres. Et en vertu d’un ordre d’Hitler, tous les membres de commandos faits prisonniers étaient exécutés.

– C’était bien une quasi-mission suicide.

– Oui, mais pour le coup elle a vraiment constitué une réussite. Selon Churchill, l’opération Frankton aurait permis d’écourter la guerre de six mois.

– Ah oui, quand même.

– Mountbatten de son côté a déclaré que c’était l’attaque la plus courageuse et audacieuse lancée par les Opérations Combinées. Hasler est proposé pour la Victoria Cross, la plus prestigieuse récompense militaire britannique. Malheureusement pour lui, sa candidature est irrecevable parce qu’il a trop bien réussi sa mission.

– Pardon ?!

– L’une des conditions pour l’obtention de la Victoria Cross est de s’être fait tirer dessus par l’ennemi. Or Hasler a précisément réussi à ne pas se faire repérer pendant toute sa mission, l’ennemi n’a donc jamais eu l’occasion de s’en prendre à lui. Il doit par conséquent se contenter du Distinguished Service Order.

– Le protocole…

– Quand au RMBPD, il deviendra le Special Boat Service, les forces spéciales de la Royal Navy. Enfin en ce qui nous concerne, il y a depuis 2011 un mémorial aux héros de l’opération Frankton à la Pointe de Grave, au Verdon sur mer.

N’hésitez pas à nous soutenir pour qu’on se paie de cours d’eskimautage.

4 réflexions sur « Ca va foutre une belle pagaie »

  1. Bonjour,

    Comme toujours excellent, et en plus il y a Ron Swanson.
    En revanche, n’y aurait-il pas une coquille sur la date : « Mais le 19 décembre 1914, la Decima mène une opération dans le port d’Alexandrie »

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