Grand esprit, es-tu là ? (première)

Grand esprit, es-tu là ? (première)

Bon, Stephen Hawking est mort. Un gars qui a théorisé que les trous noirs, des objets qu’on ne peut pas observer (y’a rien à voir), s’évaporaient et finissaient par disparaître (y’a plus rien à voir). Ce que nous sommes à deux doigts de considérer comme une belle arnaque, parce que des démonstrations de ce genre on peut vous en faire à la douzaine. C’est sans doute pourquoi nous ne sommes pas profs à Cambridge. Le tout en contredisant la médecine pendant une bonne cinquantaine d’années, puisqu’il ne devait pas dépasser 25 ans et qu’il est décédé à 76 ans. Et pourtant la communauté scientifique est toute triste. La science, c’est difficile à comprendre.

Plus sérieusement, Hawking était devenu une des principales figures scientifiques vivantes, sinon la principale. LE savant. Et il est probable qu’il le serait devenu même sans parler comme un GPS bon marché. La juste récompense de travaux majeurs dans son domaine, et somme toute une notoriété tout à fait méritée.

Malheureusement, tous les esprits brillants n’ont pas bénéficié de la même reconnaissance. Certains n’ont pas eu la possibilité de mener leurs travaux, ou ont été sévèrement critiqués, quand ils n’ont pas été mis au ban de leurs disciplines. Même lorsque leurs contributions ont permis des avancées considérables, voire ont ouvert de nouveaux domaines. Comme les six remarquables individus que nous allons vous présenter à partir d’aujourd’hui (c’est la première promo, y’en aura d’autres).

(spoiler alert : aussi surprenant que cela puisse paraître, beaucoup de ces grands esprits ignorés portaient des jupons)

Alfred Wegener, un homme à la dérive

Il pense sans doute à des trucs qui s’emboîtent.

Alfred Lothar Wegener est né en 1880 à Berlin. Nous n’avons pas de détail sur son enfance, mais il est vraisemblable qu’il a passé beaucoup de temps sur des puzzles, comme le montrera la suite. Il ne néglige pas ses études pour autant, et obtient en 1904 un doctorat d’astronomie de l’université de Berlin. En vertu de quoi il s’intéresse à…la météorologie. Alfred est du genre à s’intéresser à plein de sujets. Il est le premier à utiliser des ballons pour étudier les mouvements d’air. Avec son frère Kurt, il établit un record mondial en volant 52 heures dans un ballon (52 plombes dans un ballon…nous n’avons pas conscience à quel point on se faisait chier avant Internet). Il se prend également d’une passion pour le Groenland, et y mène plusieurs expéditions pour étudier le temps. Il en conclut que le temps passe super-lentement quand on est dans une station de recherche au Groenland. Non, pardon, il y étudie le temps au sens météo.

Un jour qu’il regardait une carte, Wegener se dit que les contours des continents, en particulier l’Afrique et l’Amérique du sud, semblent vraiment fait pour s’emboîter les uns dans les autres, comme des pièces de puzzle. De fait, il n’est pas le premier à faire ce constat, des explorateurs et cartographes l’ont déjà remarqué, dès le XVIIème siècle.

Mais Alfred ne s’arrête pas là. Il se rend également compte que des zones côtières séparées de plusieurs milliers de kilomètres présentent des similarités rocheuses et sédimentaires. De la même façon, elles contiennent des fossiles semblables (y compris des restes d’espèces tropicales dans des zones qui ne connaissent pas du tout des climats de ce type). Autant d’éléments qui le conduisent en 1912 à postuler que les continents étaient autrefois rassemblés dans une seule et même masse terrestre, et qu’ils dérivent en s’éloignant depuis. Il en tire un livre publié en 1915, L’origine des continents et océans.

Evidemment, nous connaissons la suite de l’histoire. Wegener avait raison, en vertu de quoi sa théorie reçoit un accueil triomphal. Ah ah, pas du tout. Il est vertement critiqué, pour partie parce qu’il n’est pas en mesure d’expliquer la cause de cette dérive (il imagine les continents comme de gigantesques brise-glaces traçant leur route à travers la surface terrestre, propulsés par la force centrifuge de la planète). Ce qui n’invalide cependant pas le constat. On lui reproche aussi, et peut-être surtout, d’être un météorologue qui veut s’occuper de géophysique, donc qui ne sait pas de quoi il parle et ferait mieux de se taire.

Cela dit faut bien admettre qu’à l’inverse, quand des géophysiciens parlent de climat, c’est n’importe quoi.

Sachant qu’à l’époque les géologues expliquent la présence de fossiles similaires sur les côtes de continents éloignés par l’existence de « ponts continentaux », qui auraient disparu depuis en raison de l’érosion ou de la montée des eaux.

C’est la découverte de grandes fractures dans les fonds océaniques qui permettra d’apporter les premières preuves de l’existence des plaques continentales, et d’imposer définitivement l’idée de la tectonique de ces mêmes plaques à partir des années 60.

Malheureusement pour lui, Alfred Wegener n’en saura jamais rien. Il finit gelé lors d’une expédition au Groenland en 1930, en portant secours à des camarades.

« Je t’assure, suffit d’attendre, on finira sous les tropiques. »

8 réflexions sur « Grand esprit, es-tu là ? (première) »

  1. En vrai, tout le monde sait que la terre est creuse et que les fossiles (avant d’être des fossiles) passaient par l’intérieur de la planète pour se balader pépouzes d’un continent à l’autre en gardant les pieds au sec !

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